Un couple du Seeland accro au jeu s'en tire avec une peine de prison avec sursis
Mercredi 1 mai 2024
L'homme du Seeland se rendait jusqu'à six fois par jour au distributeur automatique situé près du casino de Neuchâtel pour retirer de l'argent, des montants allant de 160 à 500 fr. Ce compte bancaire n'était autre que celui d'une amie âgée qui lui avait confié sa carte bancaire pour régler des factures en son nom. Elle ignorait que lui et sa femme dépensaient cet argent au casino. «Elle n'aurait certainement pas approuvé cela», déclare le président du Tribunal régional du Jura-bernois Seeland, Markus Gross. «La confiance quasiment aveugle d'une femme a été honteusement exploitée», déclare-t-il
La victime est décédée en 2020. Au total, environ 100'000 francs ont été retirés de son compte entre 2013 et 2017 et probablement joués au casino. Pour ce détournement et ce blanchiment d'argent, l'homme de 62 ans a été condamné à une peine de prison avec sursis de 18 mois.
Quant à sa femme, elle a écopé de sept mois de prison, également avec sursis. Bien qu'elle n'ait pas participé aux retraits d'argent, elle a activement contribué à le dilapider au casino, comme en témoignent les entrées recensées à Berne et à Neuchâtel: entre 2012 et 2017, ils ont passé 1489 jours derrière les machines à sous, soit en moyenne tous les deux ou trois jours.
En 2012, aucune sanction n'est prononcée
En 2012 déjà, l'homme avait retiré à plusieurs reprises de l'argent du compte de la personne âgée. Ces montants figurent également dans l'acte d'accusation. Ici, le tribunal l'a toutefois acquitté. Sur les sept retraits d'argent, deux ont été effectués pour un montant de 5000 fr. peu de temps après. Il n'est pas exclu que cette somme ait été utilisée à d'autres fins, éventuellement dans l'intérêt de la personne âgée.
Il serait également envisageable que l'homme ait retiré l'argent dans le cadre d'un prêt. Selon l'acte d'accusation, il y en a eu au moins sept. Parfois, il s'agissait de 40'000 fr. que la personne âgée avait donnés au couple. D'autres fois, il est question de 10'000 fr. Au total, il s'agirait d'environ 130'000 francs.
Il a été reproché à l'homme d'avoir commis une escroquerie par métier à plusieurs reprises. En effet, il aurait été clair pour lui qu'il ne serait jamais en mesure de rembourser l'argent comme promis.
Cependant, le tribunal a également acquitté l'homme de fraude. Un contrat écrit n'existe que pour l'un de ces prêts. Il y est stipulé que rien ne doit être remboursé pendant deux ans et que ce n'est qu'ensuite qu'il sera décidé de la manière dont le remboursement doit être effectué. Le tribunal a estimé que la personne âgée devait se méfier du fait que ces deux années s'étaient écoulées sans qu'aucun argent n'ait été versé et sans que d'autres négociations n'aient été menées. Parler malgré tout d'autres prêts était donc naïf. «Elle aurait pu se protéger de ce dommage en faisant preuve d'un minimum de prudence», explique Markus Gross.
Dans de tels cas, la victime est coresponsable. C'est souvent le cas pour les escroqueries par téléphone ou en ligne. Et c'est ainsi que les escrocs s'en sortent souvent en toute impunité.
Pas d'aveux, pas de remords
Le couple a avoué à demi-mot. Lors de l'audience principale, il est revenu sur certaines de ses déclarations. Pourtant, les relevés bancaires et les entrées au casino montraient autre chose. Au tribunal, le mari s'est présenté comme une victime. Lui et sa femme se sont occupés de la personne âgée pendant des années. Il passait souvent chez elle le matin et le soir, elle faisait la cuisine à midi et faisait le ménage et le repassage chez elle tous les mois. L'argent retiré et les prêts n'auraient fait que «compenser ces services», selon eux.
Le président du tribunal Markus Gross n'est pas d'accord. «Si les deux se plaignent au tribunal qu'ils sont les lésés, c'est soit absolument effronté, soit cela témoigne d'une perte massive de contact avec la réalité». Il n'y a en tout cas pas de réduction de peine pour les deux en ce qui concerne leurs aveux. La peine est tout de même réduite, et ce parce que le principe d'accélération n'a pas été respecté – une fois de plus. Cela est dû à la surcharge du Tribunal et du Ministère public.
Avec ce jugement, l'expulsion n'est plus d'actualité. Les deux accusés sont nés en Espagne, ils sont arrivés en Suisse alors qu'ils étaient enfants. S'ils avaient été condamnés pour escroquerie par métier, c'est-à-dire pour les prêts, le tribunal aurait dû les expulser du pays, puisqu'il s'agit d'un délit inscrit au catalogue. L'expulsion ne peut être évitée qu'en présence d'un cas de rigueur. Le tribunal n'a donc pas à prendre en compte cet aspect dans le cas du couple qui vit près de Bienne avec deux de ses filles et ses petits-enfants.
Les deux peines de prison avec sursis sont assorties d'un délai d'épreuve de trois ans. Si le couple n'a rien à se reprocher durant cette période, il n'aura pas à passer derrière les barreaux. Ce qui restera, c'est le trou dans sa propre poche, qui sera encore plus grand, notamment en raison des frais de procédure.
(source : ajour.ch/Hannah Frei)
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